Le parcours du combattant suivi pour introduire le modèle de la prescription

Une rétrospective

Marianne Roth

à jour! Psychotherapie-Berufsentwicklung 8 (16) 2022 54–56

https://doi.org/10.30820/2504-5199-2022-2-54

Depuis le début de l’année, après que la brume qui entourait l’introduction du modèle de la prescription avait commencé à se dissiper, un grand nombre de questions nous ont été adressées par des membres à propos de la mise en œuvre de cette dernière, dont la réponse nous a tenus en haleine pendant des mois. On trouvait au premier plan des préoccupations exprimées l’exigence d’un tarif ainsi que d’une structure tarifaire qui reflète les prestations effectives fournies par un ou une psychothérapeute. Ces derniers ont dû être négociées entre les associations de psy et celles des assureurs à la demande du Conseil fédéral.

Échec des négociations tarifaires

Il est assez vite apparu que ces négociations seraient longues et ardues. Un rapprochement progressif et un accord sur un tarif semblait toutefois possible. Mais il n’en fut rien. De façon totalement inattendue et sans annonce préalable, un des partenaires tarifaires, tarifsuisse, a informé les associations de psy avoir demandé avec la CSS que ce qu’on appelle un tarif de travail soit défini dans tous les cantons, encore avant le 1er juillet 2022. Nous avons constaté que la structure tarifaire péniblement élaborée et sur laquelle les partenaires tarifaires étaient parvenus à un accord après 14 mois de négociations, n’avait pas été prise en compte par tarifsuisse et la CSS dans la demande émise. Au lieu de cela, la demande des deux communautés d’achat s’appuyait fortement sur les positions tarifaires et valeurs du point tarifaire de la psychothérapie déléguée du Tarmed, ce que nous ne pouvions pas accepter. Il était incompréhensible et complètement illogique que les dépenses pour les psychothérapeutes exerçant en indépendants dussent être les mêmes que ceux et celles qui exerçaient en tant qu’employé(e)s. C’est une grande satisfaction que nous sommes finalement parvenus à obtenir que les cantons qui devaient fixer un tarif provisoire suivent notre proposition et que tous les cantons finissent par accepter notre solution.

Clarification du sujet de l’assurance complémentaire

Il n’était de prime abord pas évident d’identifier la direction que prendrait l’assurance complémentaire, du fait qu’aucune réponse claire ne pouvait être perçue de la part des assureurs. Après la date d’introduction pour le modèle de la prescription du 1er juillet, il apparut rapidement que la possibilité de décompter les thérapies via l’assurance de base rejetait l’assurance complémentaire à l’arrière-plan. Nous avons encore lancé en juillet 2022 une enquête auprès de 45 caisses maladie et avons reçu une réponse de bien la moitié de ces dernières. Ces dernières n’ont pas permis de se faire une image claire, même si une partie d’entre elles se fondaient sur l’art. 44 LAMal sur la protection tarifaire. Cet article stimule que les fournisseurs de prestations doivent s’en tenir aux tarifs et prix fixés contractuellement ou par décision administrative et ne doivent pas facturer de rémunérations allant plus loin. Si le ou la psychothérapeute ne veulent pas fournir de prestations d’après cette loi, il ou elle doit le déclarer au service désigné par chaque gouvernement cantonal. Il n’y a dans ce cas aucun droit à être rémunéré d’après cette loi.

Une seconde enquête, que nous avons réalisée début septembre, a confirmé les modes de décompte fixés d’après l’art. 44 LAMal. Celui-ci stipule qu’une assurance complémentaire peut seulement prendre en charge des prestations en complément de l’assurance de base. Si le paiement d’un traitement d’après l’assurance de base est prévu, ceci a toujours priorité. Ce sont les psychothérapeutes qui sont tenus d’informer leurs clients et clientes et leurs patients et patientes en conséquence.

Psychothérapie déléguée

La règle en vertu de laquelle les psychothérapeutes délégués qui travaillent dans le cadre d’une relation d’emploi n’étaient autorisés que jusqu’au 31 décembre 2022 a créé une grande incertitude. Après cette date, ils ou elles doivent fournir leurs prestations en indépendant(e)s. La psychothérapie déléguée avait dès le début été pensée comme une solution transitoire jusqu’à ce que les psychothérapeutes autorisés puissent fournir leurs prestations sous leur propre responsabilité professionnelle. La brève période transitoire de six mois depuis le changement de modèle ne laissait aux psychothérapeutes concernés et à leurs employeurs et employeuses que peu de temps pour se réorganiser.

Questions relatives à la prescription

L’art. 11b OPAS stipule que les psychothérapeutes et les organisations de psychothérapie psychologique peuvent fournir des prestations sur prescription médicale. La prescription est faite par un ou une médecin ayant un titre de formation postgrade fédéral ou étranger reconnu en médecine interne générale, en psychiatrie et psychothérapie, en psychiatrie et psychothérapie des enfants et de la jeunesse ou en pédiatrie et médecine de la jeunesse ou par un ou une médecin ayant une spécialisation interdisciplinaire en médicine psychosomatique et psychosociale suisse (académie de médecine psychosomatique et psychosociale). Les prestations d’intervention en cas de crise peuvent être prescrites par tous les médecins.

Cela a pris un certain temps jusqu’à ce que tous les acteurs impliqués soient au clair sur le déroulement exact d’une prescription. Bien que les associations professionnelles médicales auraient dû informer leurs membres, des cabinets médicaux n’ont pas cessé de nous demander le formulaire de prescription. Il semble que les médecins compétents pour les prescriptions n’ont été informés de la nouvelle procédure qu’avec beaucoup d’hésitation. Même si les associations de psy ont essayé d’informer leurs membres des faits par le biais de communiqués, de FAQ et de manifestations d’information, il semble que la nouvelle procédure n’ait remplacé l’ancienne que lentement.

Autorisation cantonale

Avec l’introduction du modèle de la prescription, le Conseil fédéral a délégué sa mise en œuvre aux directions générales de la santé des cantons (DGS). Le décompte via l’assurance obligatoire des soins (AOS), couramment appelée assurance de base, a rendu une procédure d’autorisation nécessaire, du fait que tous les psychothérapeutes devaient déclarer parce qu’ils voulaient se rattacher à cette possibilité de pouvoir décompter via l’AOS. Cela a entraîné des confusions, du fait que beaucoup de gens confondaient cette autorisation avec l’autorisation d’exercer.

En ce qui concerne l’autorisation, qui pouvait changer selon les cantons, nous avons également reçu d’innombrables demandes. Le formulaire complet afférent ne contient pas peu de points obscurs. Notamment la section relative aux questions concernant les exigences de qualité existantes a déclenché de grandes incertitudes. Les exigences de qualité sont basées sur l’art. 58a de la LAMal « Mesures de développement de la qualité incombant aux fournisseurs de prestations et aux assureurs ». Cet article exige que les partenaires tarifaires – associations des fournisseurs de prestations et assureurs – doivent conclure des contrats sur l’assurance et le développement de la qualité. Ceci concerne non seulement les associations de psy, mais depuis cette année les associations de l’ensemble des domaines de la santé dans notre pays. Dans notre cas, un tel contrat ne peut être négocié que lorsque le nouveau tarif a été définitivement négocié et autorisé par le Conseil fédéral. Cela veut dire qu’aucune mesure d’assurance et le développement de la qualité que nos membres auraient pu exiger n’avait encore été définie. Certains cantons ont tout de même provisoirement accepté nos règles professionnelles et les règlements d’assurance qualité que nos membres doivent respecter.

Décomptes

Outre l’autorisation, les psychothérapeutes qui voulaient faire des décomptes via l’AOS ont dû demander un numéro du registre des codes-créanciers (numéro RCC), qui simplifie les décomptes avec les caisses maladie. Comme l’attribution du N° RCC prenait beaucoup de temps, les décomptes ont tout de même pu être faits rétroactivement jusqu’au 1er juillet 2022. Il est important que seuls des psychothérapeutes indépendants puissent disposer d’un N° RCC, mais pas les personnes en formation postgrade (voir à ce sujet l’article dans ce cahier) qui sont employés dans un cabinet de psychothérapie.

Dès le début du basculement vers le modèle de la prescription, la caisse des médecins a proposé un navigateur qui contient toutes les positions tarifaires et avec lequel tous les éléments d’une psychothérapie peuvent être saisis en ligne en toute commodité. Nous avons également noué une coopération avec PsyFile, qui a également mis en place une offre numérique complète. Les deux offres sont liées à des conditions particulières pour nos membres. Nous avons mis un formulaire de facture à la disposition des personnes qui souhaiteraient ne pas effectuer leurs décomptes en ligne. Il est toutefois important d’attirer l’attention sur le fait que tôt ou tard, les transmissions électroniques de décomptes deviendront obligatoires. Le Conseil fédéral a annoncé dès l’été que, dans le cadre de mesures d’amortissement des coûts, l’ensemble des fournisseurs de prestations dans le domaine stationnaire et ambulatoire seraient tenus à l’avenir de transmettre leurs factures sous forme électronique. Comme la configuration de cette transmission électronique a été transférée aux partenaires tarifaires, c’est assurément un nouveau marathon de négociations qui nous attend ici.

Marianne Roth est directrice générale de l’ASP.