De l’importance des réactions émotionnelles dans le cadre psychothérapeutique
Felix Peter
à jour! Psychotherapie-Berufsentwicklung 9 (18) 2023 68–70
https://doi.org/10.30820/2504-5199-2023-2-68
Les jeunes éprouvent un large éventail de réactions émotionnelles face aux crises socio-écologiques telles que la crise climatique, y compris des émotions désagréables telles que la peur, la colère, la tristesse ou la frustration (par exemple Hickman et al., 2021), mais des réactions émotionnelles agréables telles que la confiance ou le sentiment d’appartenance sont également possibles. Ces émotions peuvent varier considérablement en fonction de facteurs individuels, tels que la connaissance des crises, les attitudes personnelles à leur égard, le soutien social perçu ou les compétences émotionnelles existantes.
La source de l’émotion peut également affecter la gravité de la réaction : certains adolescents peuvent afficher une forte réactivité émotionnelle aux conséquences directement vécues, tandis que d’autres peuvent réagir plus fortement aux informations médiatiques ou aux conséquences anticipées. Il arrive qu’ils se sentent principalement menacé ou s’inquiètent pour les autres ou l’environnement. Mais les mesures politiques de protection du climat peuvent également inquiéter les jeunes, qu’il s’agisse de mesures manquantes ou inadéquates ou de mesures perçues comme des restrictions excessives.
Un mélange émotionnel complexe
Il existe des preuves empiriques des réactions émotionnelles généralisées face aux crises socio-écologiques, en particulier en ce qui concerne ce que l’on appelle « l’anxiété climatique », c’est-à-dire les inquiétudes et les craintes concernant la crise climatique et ses conséquences (par exemple Tsevreni et al., 2023). Cependant, ces études ne représentent pas des études de prévalence sur l’expression cliniquement significative des peurs et les instruments utilisés sont très différents et globalement encore de qualité limitée (Martin et al., 2023). De plus, l’accent mis dans le discours social et la recherche psychologique sur la peur climatique a négligé la prise en compte d’autres réactions émotionnelles importantes telles que la colère ou la fureur (Contreras et al., 2023).
On peut supposer que les adolescents confrontés à des crises socio-écologiques éprouvent souvent non pas une seule émotion, mais un mélange complexe d’émotions différentes. Par exemple, la colère et la frustration face à l’inaction des adultes peuvent s’ajouter à l’espoir d’un changement positif ou à la peur d’un éventuel échec. Les émotions désagréables peuvent conduire à un stress psychologique, qui s’ajoute aux facteurs de stress quotidiens et à d’autres pressions particulières. Étant donné que les crises socio-écologiques sont individuellement accablantes et dureront longtemps, une surcharge émotionnelle et un stress psychologique grave peuvent en résulter. Les adolescents font partie des groupes de population particulièrement vulnérables puisqu’ils se trouvent dans des phases de développement sensibles et sont particulièrement sensibles face l’avenir (cf. Peter et al., 2023).
Certains adolescents répondent aux crises en s’impliquant dans la protection de l’environnement et du climat, mais aussi dans des questions connexes telles que la justice sociale. De telles stratégies d’adaptation axées sur les problèmes peuvent procurer le sentiment d’avoir un certain pouvoir sur les événements. Dans le même temps, un tel engagement est également associé à un stress émotionnel, puisqu’il peut s’accompagner de conflits, de frustration et de rejet social. Il convient également de noter que tous les adolescents ne sont pas activement confrontés aux crises socio-écologiques ou ne sont pas conscients des risques qui y sont associés. Dans ce cas, aucune réaction émotionnelle désagréable ne se produirait. Cet aspect est souvent négligé dans le débat sur la peur climatique et d’autres réactions émotionnelles, mais cela présente un potentiel supplémentaire de conflit.
Contexte de conseil professionnel
Quoi qu’il en soit, il est important de noter que les réactions émotionnelles face aux crises socio-écologiques peuvent varier individuellement pour de nombreuses raisons. Il n’existe donc pas ici de tableau uniforme et il ne peut donc pas y avoir de réaction standardisée. Il est donc crucial que le domaine de l’accompagnement professionnel des jeunes adopte une approche sensible et individuelle, prenant en compte des expériences et des réactions spécifiques et étant ouvert aux réactions contre-intuitives.
Néanmoins, les peurs et les inquiétudes joueront probablement un rôle chez les jeunes qui recherchent un soutien professionnel. Dans un cadre psychothérapeutique, de telles réactions émotionnelles désagréables peuvent se manifester comme suit (Dohm et al., 2023, p. 7) :
Le contexte de conseil professionnel peut offrir aux jeunes un espace et un cadre sûr pour parler de leurs sentiments liés aux crises socio-écologiques. Il convient de normaliser et de valider les éventuels ressentis désagréables qui pourraient être évoqués en fonction de leurs causes réelles et urgentes. L’accent thérapeutique ne doit pas être mis sur la résolution des émotions désagréables (qui pourraient favoriser des stratégies d’adaptation inadaptées), mais plutôt sur leur gestion adaptative : ensemble, nous pouvons rechercher « la bonne combinaison individuelle d’engagement, d’acceptation et de pause » (ibid.), qui correspondrait à une stratégie d’adaptation adaptative et axée sur le sens. La condition préalable est que les conseillers aient réfléchi à leurs propres attitudes et réactions face aux crises socio-écologiques.
Des méthodes psychoéducatives pourraient également être utilisées pour informer les jeunes sur l’impact émotionnel des crises afin qu’ils puissent mieux comprendre et gérer leurs propres réactions. Pour amortir d’éventuelles réactions émotionnelles fortes, il convient également de proposer des techniques éprouvées de gestion du stress. Enfin et surtout, une approche axée sur les ressources est utile : de cette manière, des stratégies d’adaptation réalisables peuvent être élaborées sur la base des forces individuelles et des ressources sociales existantes.
Dans l’ensemble, il est important que le champ psychothérapeutique continue de s’ouvrir aux conséquences psychologiques possibles des crises socio-écologiques, qu’elles soient directement vécues, vécues à travers les médias ou anticipées cognitivement, et qu’il tienne compte de la vulnérabilité particulière des jeunes.
Bibliographie
Contreras, A., Blanchard, A., Daouda, C. M. & Heeren, A. (2023). It is time to focus on eco-anger rather eco-anxiety: A temporal network approach to the emotional experience of climate change. https://doi.org/10.31234/osf.io/sp8hn
Dohm, L., Chmielewski, F., Peter, F. & Schulze, M. (2023). Klima-Angst und ökologischer Notfall. Ärztliche Psychotherapie, 18(1), 5–9. https://doi.org/10.21706/aep-18-1-5
Hickman, C., Marks, E., Pihkala, P., Clayton, S., Lewandowski, R. E., Mayall, E. E., Wray, B., Mellor, C. & Susteren, L. van (2021). Climate anxiety in children and young people and their beliefs about government responses to climate change: A global survey. The Lancet Planetary Health, 5(12), e863–e873. https://doi.org/10.1016/S2542-5196(21)00278-3
Martin, G., Cosma, A., Roswell, T., Anderson, M., Treble, M., Leslie, K., Card, K. G., Closson, K., Kennedy, A. & Gislason, M. (2023). Measuring negative emotional responses to climate change among young people in survey research: A systematic review. Social Science & Medicine, 329, 116008. https://doi.org/10.1016/j.socscimed.2023.116008
Peter, F., Dohm, L. & Krimmer, M. (2023). Psychische Konsequenzen der Klimakrise. Mehrfachbetroffenheit von Kindern und Jugendlichen angesichts sich verändernder Lebensbedingungen. Monatsschrift Kinderheilkunde, 171(2/2023), 130–137. https://doi.org/10.1007/s00112-022-01670-x
Tsevreni, I., Proutsos, N., Tsevreni, M. & Tigkas, D. (2023). Generation Z Worries, Suffers and Acts against Climate Crisis—The Potential of Sensing Children’s and Young People’s Eco-Anxiety: A Critical Analysis Based on an Integrative Review. Climate, 11(8), Article 8. https://doi.org/10.3390/cli11080171
Dr. Felix Peter, Dipl.-Psych., est accompagnateur de processus orienté sur les solutions et formateur en résilience. Il travaille comme psychologue scolaire en Allemagne et fait partie de l’initiative de recherche « Planetary Health and Transformative Change ».