Nicola Gianinazzi & Martino Regazzi
https://doi.org/10.30820/2504-5119-2020-2-50
L’ASP travaillant en Suisse italienne – dont je suis délégué – a également et surtout donné des conseils à ses membres et aux patients* qui en ont fait la demande, en relation avec la pandémie de COVID-19. Elle a notamment participé à l’organisation et à la gestion des centres de signalement en collaboration avec l’Unité cantonale de crise, l’Organizzazione Sociopsichiatrica Cantonale (OSC), l’Associazione Ticinese degli Psicologi (ATP) et d’autres organismes cantonaux actifs dans ce domaine. Une douzaine de nos membres ont donné de leur temps pour ce type d’intervention en ligne et pour un institut de formation de troisième cycle.
Vu le caractère dramatique des événements au Tessin et dans les Grisons italiens, mais aussi vu la phase actuelle, qui est également critique pour la région, j’ai décidé de compléter mon rapport par les expériences de mon collègue de l’ASP, Martino Regazzi, qui a travaillé dans un hôpital en première ligne :
Le soutien psychologique dans la pandémie
COVID-19, un acronyme qui a maintenant trouvé sa place dans notre vocabulaire et qui n’a pas besoin d’être traduit. Il n’y a pas si longtemps, elle était inexistante, mais depuis que ce néologisme a été inventé, tous les habitants* de la planète savent de quoi nous parlons. Même sans une recherche active d’informations, nous sommes quotidiennement bombardés de nouvelles, de statistiques et de termes scientifiques plus ou moins valables qui, jusqu’à récemment, étaient inconnus de la plupart d’entre nous. Progressivement, nous apprenons à connaître cette cause insidieuse de souffrance et à comprendre à quel point elle affecte notre vie quotidienne, mais au fur et à mesure que les connaissances augmentent, le sentiment d’insécurité qui imprègne notre existence semble toujours persister. L’inconnu domine la scène mondiale et nous expose tous à un état de peur que notre génération n’a jamais connu auparavant : une agitation sans nom (qui pour certains se transforme même en terreur) qui nous oblige à faire un travail spirituel inhabituel.
Aider les gens à faire face à l’inconnu est ma tâche en tant que chef du Service de Cardiopsychothérapie du Cardiocentro Ticino : un service qui s’adresse depuis des années à tous les patients* du Cardiocentro Ticino et à leurs familles. L’expérience m’a appris que le diagnostic d’une maladie cardiaque a une forte valeur émotionnelle, caractérisée par des sentiments contrastés et envahissants qui mettent le patient/la patiente dans un état d’anxiété profonde, accompagné d’un sentiment d’injustice et, malheureusement, dans de nombreux cas, d’une rupture massive de l’identité. C’est dans ce contexte que la cardiopsychothérapie trouve sa valeur particulière. L’évolution d’une maladie est une transition temporelle entre des phases où l’état mental est dominé par des sentiments de persécution et des phases où une dépression se produit soudainement. Et ce n’est qu’en acceptant ces sautes d’humeur et en y réfléchissant qu’il est possible de restructurer sa propre image corporelle afin de parvenir à une récupération complète. La situation actuelle de la lutte contre la COVID-19 a inévitablement conduit à ce que le système de santé dans son ensemble soit obligé de modifier ses modalités d’intervention. La ferme volonté de la psychologie cardiologique de continuer à fournir aux patients* les services auxquels ils/elles sont habitué(e)s a renforcé notre capacité à travailler avec des moyens qui ne faisaient pas partie de notre répertoire professionnel auparavant : les contacts personnels face à face, comme c’était le cas auparavant, ont été largement remplacés par des contacts via des moyens de communication à longue distance tels que le téléphone, Internet, Skype, etc. La situation causée par le virus nous a imposé une telle adaptation. D’une certaine manière, nous apprenons de nouvelles pratiques pour poursuivre notre travail avec les patients*. Au Cardiocentro, le travail des psychothérapeutes se fait principalement par téléphone, et un service de premiers secours psychologiques a été mis en place pour tout le personnel de l’institution.
Dans ce contexte, l’urgence psychologique développe sa spécificité en offrant au personnel l’espace et le temps (physiques et psychologiques) qui peuvent servir de contenant métaphorique :
Martino Regazzi est psychothérapeute (ASP) et chef du service cardiopsychothérapeutique du Cardiocentro Ticino.
Nicola Gianinazzi est membre du comité de l’ASP et délégué pour la Suisse italienne.